Impacts de l’arasement d’un barrage sur la morphologie d’un cours d'eau et la remobilisation de sédiments contaminés

Résumé: 

L’impact anthropique sur les cours d’eau a significativement augmenté suite à la révolution industrielle engagée par les pays occidentaux. Ainsi, les modifications de la géomorphologie des cours d’eau pour le stockage de l’eau et la navigation, la conversion des surfaces à des fins agricoles, industrielles et d’urbanisation illustrent cette pression environnementale, qui se traduit, en autre, par une augmentation de rejets de divers contaminants dans les compartiments environnementaux et notamment les rivières. Un part de ces rejets peut donc se retrouver dans les matières en suspension, considérées alors comme des puits de stockage, qui transitent dans les rivières. Les aménagements des rivières et notamment la construction de barrages favorisent alors la sédimentation de ces particules contaminées au cours du temps.

L’Eure, affluent majeur de l’estuaire de Seine, a connu de profondes modifications géomorphologiques en aval de son bassin versant, avec pour principales conséquences un exutoire déplacé d’une dizaine de kilomètres en direction d’un barrage et la formation d’annexes hydrauliques favorisant l’accumulation de sédiments dès les années 1940. Les tendances temporelles des éléments traces métalliques et métalloïdes ont montré de fortes contaminations en As dans les années 1940 et des contaminations d’origines industrielles en Cr, Co, Ni, Cu, Zn, Ag et Cd durant les années 1960–1970, ainsi que des contaminations en Sb et Pb en 1990–2000.

Récemment, l’Eure aval a connu une nouvelle perturbation anthropique visant à restaurer la continuité écologique, l’arasement du barrage localisé à l’exutoire du cours d’eau. Cet arasement a eu pour conséquence l’érosion et le transfert vers l'aval de sédiments contaminés initialement stockés dans le chenal et dans une annexe hydraulique. Ainsi, ces sédiments initialement considérés comme puits jouent désormais un rôle de sources de contaminants. Ce cas d’étude pose alors la question de la résilience des bassins versants aux perturbations anthropiques. En effet, malgré l’arrêt des activités responsables des rejets de contaminants, peu d’entre eux sont aujourd’hui mesurés à des teneurs proches des teneurs naturelles, et la remise en suspension de sédiments contaminés lors de l’arasement de barrages peut contribuer à entretenir cela, alors que les instances internationales visent un retour à un bon état écologique des masses d’eau par le biais de directives telle que la Directive Cadre sur l’Eau européenne. Or, l’effacement des structures empêchant la libre circulation des sédiments est une des exigences de ces directives. L’arasement des barrages est donc une question centrale des décennies futures au regard de l’état critique de certaines structures risquant de céder et des directives internationales. 

Auteur: 
Thomas Gardes
Affiliation: 
M2C
https://us02web.zoom.us/j/81515143200
Vendredi, 11 juin, 2021 - 12:00