Dynamique de la matière organique et des communautés microbiennes au cours de la stabilisation du carbone dans les agrégats biogéniques

Dynamique de la matière organique et des communautés microbiennes au cours de la stabilisation du carbone dans les agrégats biogéniques

Directrice de thèse : Katell Quénéa

La matière organique (MO) est un élément déterminant du sol, tant par son influence sur le fonctionnement des sols, que par ses interactions avec certains polluants ou par son rôle clé dans les cycles biogéochimiques. Le rôle potentiel des sols dans le stockage de carbone est également maintenant largement reconnu et source d’un intérêt croissant. La minéralisation du carbone inclus dans la matière organique (MO) des sols est liée à la capacité des microorganismes à la dégrader. Celle-ci est contrainte par la composition chimique de cette MO, mais surtout par son accessibilité qui peut être limitée par les interactions organo-minérales. Si la composition chimique intrinsèque de la MO ou les interactions organo-minérales (agrégats) semblent déterminantes dans la protection de la MO, l’importance relative de ces processus reste à déterminer. Il est donc nécessaire de mieux comprendre et de quantifier les processus impliqués dans la protection de la MO et qui influencent son temps de résidence dans les sols.

Les agrégats constituent des structures au sein desquelles la dynamique de la MO est fortement contrainte (accessibilité, teneur en O2,…). Or la MO est centrale dans la mise en place des agrégats. Comme son abondance et sa composition chimique évoluent au cours du temps (via les processus de biodégradation), cela modifie progressivement sa contribution à la stabilité physique des agrégats. Il en résulte une réelle dynamique des agrégats et en conséquent de la MO (Tisdall et al., 1982 ; Six et al., 2004 ; Degryze et al, 2006), la protection de la MO pouvant évoluer au cours du temps.

En zone tempérée, par leur activité dans les sols, les vers de terre forment d’importantes quantités d’agrégats biogéniques (turricules). La production annuelle de turricules a été estimée entre 30 et 50t/ha. Ainsi du fait de leur abondance dans l’environnement et de leur teneur en MO élevée, ces turricules pourraient contribuer significativement à la protection de la MO. Cependant, les effets des vers de terre sur la dynamique de la MO sont complexes et dépendent de l’échelle temporelle considérée. A court terme, ils accroissent la minéralisation de la MO (e.g. méta-analyse de Lubbers et al., 2013) du fait de la métabolisation de la MO mais également de la stimulation des microorganismes. Par ailleurs, à long terme, d’autres études considèrent que, lors de leur « vieillissement », les turricules atteindraient un nouvel équilibre dans laquelle la MO incluse serait protégée (Brown et al., 2000, Lavelle et al., 1992 ; Brown et al., 2000). Par ailleurs, Zhang et al. (2017) ont mis en évidence des effets des vers différents selon la teneur en carbone initiale du sol. En conséquent, l’influence des vers de terre sur la dynamique de la MO est encore discutée (Shippitalo et al ; 1989 ; Lubbers et al., 2003 ; Brown et al., 2000) et reste à déterminer.

L’objectif de cette étude est d’évaluer le potentiel de stabilisation du carbone dans les agrégats biogéniques (ou turricules) en étudiant la dynamique des interactions entre les microorganismes et celle de la MO au cours du vieillissement des turricules. Afin de comprendre les mécanismes en jeu, il est nécessaire de suivre conjointement le devenir de la MO (minéralisation ou modification de sa composition chimique), par RMN 13C à l’état solide, Py GC-MS et mesure du CO2 émis, et les communautés microbiennes impliquées (abondance, diversité, activité des microorganismes par des outils de biologie moléculaire), au cours de ce vieillissement. Par une approche intégrée associant à la fois des analyses biogéochimiques et microbiologiques, le potentiel de stabilisation de la MO au travers de la structuration biogénique du sol pourra être estimé.

Cette étude sera réalisée dans le cadre d’un projet pluridisciplinaire EC2CO de l’INSU-CNRS impliquant une équipe du laboratoire Métis et une équipe du laboratoire IEES Paris

Date de démarrage: 
oct 2019
Contact: 
Katell Quenea
Durée: 
3 ans
Type de recrutement: 
Doctorat