Projet « GICC-Seine »  

Influence du changement climatique
sur le fonctionnement hydrologique et biogéochimique du bassin de la Seine

Réunion de mi-parcours du 4 juin 2003

Compte-rendu de l'après-midi



Discussion sur les enjeux de gestion soulevés par les résultats de la matinée

Il s'agit de renforcer le dialogue avec les acteurs de la gestion de l'eau dans le bassin de la Seine, pour faire émerger les enjeux de gestion de l'eau les plus importants en terme de prospective, et mieux cibler le travail du GICC-Seine dans ce domaine.

Pour favoriser les échanges, les scientifiques ont commencé à identifier un certain nombre de questions aux acteurs de la gestion de l'eau (voir liste ci-dessous). Elles concernent notamment les changements possibles de la gestion de l'eau d'ici à 2050 (selon la dynamique propre du secteur ou en adaptation au changement climatique) qui pourraient modifier les impacts du changement climatique sur l'hydrosystème. Notons que 2050 a été retenu comme horizon du changement climatique, mais que nos travaux prospectifs visent à appréhender les évolutions des contraintes anthropiques sur l'ensemble de la période qui nous en sépare. Nous nous intéressons donc à la dynamique propre du secteur de l'eau, ainsi qu'à de possibles adaptations au changement climatique, dont certaines pourraient nécessiter des mesures par anticipation (ex: dimensionnement d'ouvrages à longue durée de vie).

Une autre question, plus générale, consiste bien sûr à identifier les attentes des acteurs de la gestion de l'eau envers un projet comme le projet GICC-Seine, avec l'espoir que ces attentes recoupent nos questions, et cristallisent des collaborations.

Cette discussion s'inscrit donc dans le cadre de l'action 10 du projet GICC-Seine « Impacts en terme de gestion de l'eau: rétrocession aux gestionnaires du bassin », et l'idéal serait à terme de tirer de ces réflexions concertées une évaluation utile en terme de gestion de l'eau des impacts du changement climatique sur l'hydrosystème.




Tabuchi (AESN - Agence de l'Eau Seine - Normandie) :
- les présentations ne remettent pas en cause des enjeux de gestion actuellement identifiés
- mais elles mettent en avant certains enjeux particuliers :
        - risque de capacité en eau insuffisante pour la fabrication d'eau potable en été (ce qui est lié à la gestion des barrages réservoirs)
        - questions d'inondation
        - pluies hivernales potentiellement plus fortes : problèmes de débordement des réseaux et de traitement de la pollution par temps de pluie (volume important et pollution plus diluée, i.e. plus difficile techniquement à traiter)

Villion (IIBRBS - Institution Interdépartementale des Barrages-Réservoirs du Bassin de la Seine) :
- attention, il est plus ou moins vrai que plus de crues permet de mieux remplir les lacs-réservoirs et de mieux soutenir les étiages. En effet, un des rôles des lacs-réservoirs est aussi d'absorber les crues, ce qui nécessite que les réservoirs ne soient pas pleins au moment de crues importantes. Le printemps est une période charnière cruciale entre les deux rôles (absorption des crues, soutien des étiages), et il est aussi important de connaître l'historique des débits sur plusieurs années.

Roederer (DREIF- Direction Régionale de l'Equipement Ile de France) :
- les fonctions de l'eau sont nombreuses...
- il risque d'y avoir en été compétition entre irrigation et fabrication d'eau potable
- importance des deux extrêmes crues et étiages en terme de gestion

Barbay (MEDD/DPPR -
Direction de la prévention des pollutions et des risques) :
- l'urbanisation et l'imperméabilisation associée sont importantes vis-à-vis des crues

Méric (SIAAP - Syndicat Interdépartemental pour l'Assainissement de l'Agglomération Parisienne) / Tabuchi (AESN) :
- les surfaces imperméabilisées représentent environ 3% de la surface du bassin de la Seine, avec une augmentation de 1%/an (1% de 3% !) en moyenne, mais des augmentations par endroit et diminutions à d'autres endroits ; c'est sans doute du second ordre par rapport à des changements de végétation, ... ou de climat.
- il existe des techniques pour retarder les crues, comme la maîtrise du ruissellement en milieu rural, dont l'impact serait plus que sensible à l'échelle du bassin de la Seine


La variabilité des débits est un élément clé : insiter sur crues et étiages, et donner leur enveloppe de variabilité (écart-type) en se basant sur la variabilité actuelle (puisque le changement climatique envisagé ne change que le climat moyen)
Dessèvre (DIREN - Direction régionale de l'environnement ) :
- l'irrigation est un réel enjeu, d'autant qu'il se manifeste quand il y a peu d'eau
- voir les ateliers de prospective incluant le bureau d'étude Futuribles....?


Poux (AScA/ENGREF - Projet GICC-Seine) :
- l'impact de l'irrigation sur l'hydrosystème est très différent selon qu'elle se base sur des retenues collinaires ou des pompages profonds


Allardi (MEDD/DE - Direction de l'Eau) :
- une des fonctions de la rivière est de rester une rivière : les retenues collinaires ne sont sûrement pas recommandées par rapport au bon état écologique préconisé par la DCE (Directive Cadre sur l'Eau)


GICC-Seine : l'irrigation n'est pas représentée par les modèles utilisés dans le projet :
- modèles hydrologiques MODCOU/NEWSAM et CaB : irrigation non prise en compte (même si c'est conceptuellement possible de ramener de l'eau de la nappe/rivière vers le bassin versant)
- modèle agronomique STICS : irrigation imposée comme pratique culturale propre à chaque culture, mais l'eau correspondante ne vient pas du bassin. C'est une eau "virtuelle", imposée comme pluie supplémentaire.
La relation entre l'irrigation requise pour la culture et la ressource en eau disponible pour cette l'irrigation sera examinée, et la rétroaction sera du type : ressource en eau suffisante pour l'irrigation nécessaire => culture possible, sinon culture éliminée. En effet, si la ressource en eau est insuffisante, l'agriculteur passera selon toute probabilité à une culture moins exigeante en eau, plutôt que de réduire l'irrigation ce qui réduit le rendement et augmente l'incertitude sur la récolte.

Autres questions :
- est-ce possible de déterminer si l'irrigation est économiquement viable ? Réponse : non, pas dans le projet GICC-Seine
- peut-on prendre en compte les progrès liés à l'amélioration génétique en terme de besoins en eau ?
Réponse :
c'est très peu probable qu'il y ait des progrès dans ce sens. Si on peut attendre des progrès, ce serait plutôt en terme de spécialisation vers des espèces dont les cycles saisonniers sont plus en phase avec la ressource en eau.

Le projet GICC-Seine peut donc fournir les éléments de réponse suivants :

        - pour un climat donné, tendance de débit, piézométrie, humidité du sol

        - besoins optimaux pour une culture X un climat (i.e. la culture irriguée est-elle possible ou pas)
Projet GICC-Seine :
- le drainage agricole joue sur les crues, mais, comme l'irrigation, il n'est pas représenté dans les modèles du projet GICC-Seine.
- une des motivations de ce drainage est de permettre le travail des sols par les engins agricoles.
- on connait les humidités qui permettent le travail des champs. 


Dessèvre (DIREN) :
- les agriculteurs demandent déjà à faire baisser les niveaux piézométriques dans les plaines alluviales (en jouant sur le niveau des cours d'eau) pour pouvoir entrer plus vite dans les champs.


Le projet GICC-Seine propose de diagnostiquer l'humidité sous forme de cartes (spatialisées) mensuelles, et d'accompagner cette information des seuils d'humidité pour le travail des différentes cultures.
Lamy (AESN) :
- les impacts du changement climatique présentent des caractéristiques différentes à l'amont et à l'aval. Est-ce que les performances des modèles sont équivalentes à l'amont et à l'aval ?
Réponse : les modèles hydrologiques ont été validés non seulement à l'aval mais aussi en de nombreuses station le long du réseau hydrographique.

Barbay
(MEDD/DPPR) :

- les zones humides jouent un rôle dans l'atténuation des crues, notamment à l'amont du bassin. Précision : les modèles du projet GICC-seine ne peuvent pas décrire correctement ce milieu.

Villion (IIBRBS) :
- l'important pour une anticipation de la gestion des grands lacs réservoir est une prévision des débits, au pas de temps mensuel au minimum, aux prises d'eau des grands lacs ainsi qu'en 25 stations de référence dans le bassin (stations du service d'annonce des crues).

Les diagnostics importants pour la gestion sont :
- quantification des crues et des étiages : pas seulement débit annuel moyen, mais débit au minimum mensuel
- de façon spatialisée dans le bassin et pas seulement à l'aval

Comme pour les inondations/crues, les diagnostics importants sont les débits :
- débits mensuels, avec spatialisation et si possible information sur la variabilité des débits minimum (rappel : information nécessairement basée sur le climat actuel)

La démographie est également une information importante à confronter aux débits d'étiages, pour ce qui concerne l'alimentation en eau potable notamment.

Voir Q4 et Q5.
Barbay (MEDD/DPPR) :
- la stratégie de lutte contre les inondations a deux volets :
        - rétention en amont : naturelle (en particulier au niveau des zones humides) ou non
        - extension à l'aval des zones inondables

Projet GICC-Seine : les modèles tels qu'ils sont utilisés dans le projet ne peuvent pas représenter ce type d'effet. Mais il est possible de simuler les hydrogrammes en de nombreux points du bassin, pour alimenter une interprétation plus locale.

Tabuchi (AESN) :
- un élément de référence intéressant en terme d'inondations et de risques associés est la crue de 1910 (~ 2500 m3/s à Poses)

Il n'est pas possible dans le cadre du projet GICC-Seine d'évaluer comment la période de retour d'une crue du volume de celle de 1910 sera modifiée sous changement climatique, étant donné les hypothèses de changement climatique "moyen". De telles études sont plus du ressort du projet IMFREX (coord: M. Déqué, dans le cadre du programme GICC). Mais on peut garder cette crue comme élément de référence pour l'interprétation.

Tabuchi (AESN) :
- la performance d'épuration minimale que l'on peut attendre à l'horizon 2050 est la suivante
(en conditions de fonctionnement optimal des STEP)
:
            - carbone : abattement de 95 à 98 %
            - azote total : abattement de 90%
            - phosphore total : abattement de 90% (80% en 2015)
- la vraie question est alors le nombre de jours où l'on ne sera pas en mesure d'assurer la performance optimale, et les extrêmes de pluies sont cruciaux dans ce contexte :
            -
problèmes de débordement des réseaux
            - en hiver : traitement plus difficile de la pollution par temps de pluie car volume important et pollution plus diluée, mais faible effet sur le milieu à cause de cette même dilution
            - en été : les volumes débordés pendant les orages arrivent dans une rivière à faible débit, et l'impact sur le milieu est important (ex: orages marseillais)
- abattement de 100% techniquement envisageable, c'est surtout une question de coût, c'est envisagé pour les substances médicamenteuses, etc...
- le point clé en terme d'épuration est l'agglomération parisienne

Méric (SIAAP) :
- au SIAAP, les meilleures sources d'information sur le sujet sont :

            - Direction des Etudes et de la Programmation (DEP) – Directeur = M. Thibaut – 2, rue Jules César – 75589 PARIS Cedex – 01.44.75.69.65 (sec.
            - Direction de la Recherche et du Développement (DRD) – Directeur = M. Gousailles – SIAAP DRD – 82, Avenue Kléber - 92700 Colombes

- les stations d'épuration sont caractérisées par un débit de référence, fonction de l'intensité/fréquence des pluies, au delà duquel on a débordement (car réseaux non séparatifs) et tous les rejets domestiques ne sont pas traités.
- l'incertitude sur l'épuration est donc la plus forte est donc en temps de pluies
- réseaux séparatifs :
        - rien n'est vraiment prévu aujourd'hui sur le domaine de l'ancien département Seine
        - il y a quelques passages d'un réseau unitaire à un réseau séparatif en banlieu, mais ça reste marginal.

La performance d'épuration minimale que l'on peut attendre à l'horizon 2050 est la suivante (en conditions de fonctionnement optimal des STEP):
            - carbone : abattement de 95 à 98 %
            - azote total : abattement de 90%
            - phosphore total : abattement de 90% (80% en 2015)
La vraie question est alors de nombre le jours où l'on ne sera pas en mesure d'assurer la performance optimale, et les extrêmes de pluies (hiver/été) sont cruciaux dans ce contexte.

Tabuchi (AESN) : OUI, inchangées par rapport à 2003 :
- N et C : il n'y a pas de raison qu'elles changent sauf changement radical des modes de vie et de l'alimentation
- P : on est revenu au niveau d'avant les lessives phosphatées, et là encore, il n'y a plus de raison que les émissions unitaires changent

Dessèvre (DIREN) :

- confirmation sur le P: l'équivalent habitant a été revu de 4.5 gP/hab/jour à 2.1gP/hab/jour

Tabuchi (AESN) / Roederer (DREIF) : les rejets industriels vont continuer à baisser puis se stabiliser (améliorations technologiques + délocalisation)
Tabuchi (AESN) :
C'est sans doute par l'agriculture (et la contamination des nappes en nitrates, pesticides...) que le bassin de la Seine péchera par rapport aux exigences de bon état écologique de la DCE.

Lamy (AESN) :
- est-ce que le changement climatique changera le temps de renouvellement des aquifères ? Réponse : si les niveaux piézométriques diminuent, les circulations horizontales sont plus lentes et le temps de renouvellement augmente.
- érosion et transport solide ? Réponse : la charge solide en rivière n'est pas contrainte dans le modèle Sénèque par un modèle physique d'érosion dans le bassin versant, si bien que nous ne pourrons pas aborder correctement cette question.

Muller (MEDD/D4E) :
- un changement de politique d'occupation des sols nécessiterait une anticipation. Les occupations sensibles incluent :
        - zones d'urbanisation (mais la fraction urbaine restent très minoritaire à l'échelle du bassin)
        - forêt : c'est le sujet d'un autre projet GICC, le projet CARBOFOR (coord : D. Lousteau)

Tabuchi (AESN) :
- une anticipation nécessiterait de pouvoir identifier quel scénario de changement climatique est le plus probable.... On ne peut pas baser une refonte des réseaux, par exemple, avec une probabilité de 30% seulement...

Réponse : ça n'est pas possible de donner des probabilités aux différents scénarios, étant donné les incertitudes sur les émissions et sur les modèles de circulation générale (climat). Un objectif du projet GICC-Seine est cependant d'examiner l'impact consécutif à un maximum de scénarios de changement climatique (croisant modèle et scénario d'émission) pour voir s'il existe ou non des convergences dans les impacts simulés. 




Dernière mise à jour en juin 2003.